Le 3 décembre 2020, Hilary Hahn, violoniste mondialement reconnue pour sa virtuosité, et son jeu expressif (n’en déplaise à ses détracteurs) se lançait dans un nouveau projet sur YouTube : poster des enregistrements de concertos pour violon et orchestre… Sans orchestre !
Le premier épisode d’une série baptisée « Hahn Solo » était consacré à un monument du répertoire pour violon, le concerto en ré mineur opus 47. Il faut dire d’abord que la tentative peut apparaître comme une négation du principe même du concerto, qui implique un dialogue avec un orchestre. L’artiste s’en défend : « Si aucun concerto n’est une affaire de soliste uniquement, cela peut aider d’examiner une seule partie dans le but de comprendre le tout. » Le projet artistique prend alors plus de sens : découvrir ce qu’on n’entend pas (ou plus) de la partie de violon ; retrouver l’extase des thèmes les plus connus, mais à nu ; saisir les instants plus discrets qui soulignent habituellement les voix de l’orchestre.
Si l’expérience est déroutante dans les premières mesures, c’est incontestablement un pari réussi pour la violoniste américaine. L’interprétation, brillante (mais de cela jamais on ne douta), prend une force toute particulière sans les autres musiciens, dans une ambiance qui gagne en solennité. Toutefois, et l’on comprend ainsi l’ambition d’Hilary Hahn, jamais on oublie la partie d’orchestre, jamais on est tenté d’y renoncer définitivement. Le travail de la soliste au contraire souligne l’importance des dialogues avec les autres musiciens, qui s’illustrent par leur absence. Pendant les trente minutes de musique, on ne peut s’empêcher de s’imaginer les répliques tues d’un orchestre absent. Cependant, cette absence semble presque nécessaire lorsqu’on écoute la même Hilary Hahn dans le même concerto de Sibelius, mais accompagnée par l’Orchestre philharmonique de Radio France placé sous la direction de Mikko Franck. Par le vide qu’installe « Hahn Solo », on mesure mieux la complétude de l’œuvre du compositeur Finlandais, idolâtré dans son pays natal.
En somme, ce premier épisode est tout à fait encourageant pour la suite : le pari est réussi pour Hilary Hahn, à plusieurs titres. Premièrement, elle est parvenue à rappeler la nécessité d’écouter l’orchestre dans un concerto, tout en réduisant l’œuvre à sa plus simple expression, simple mais sublime : jamais peut-être n’a-t-on si bien cerné l’écriture très fine de Jean Sibelius pour le violon. Enfin, la violoniste américaine a confirmé le lien particulier qu’elle entretient avec son public, un lien de proximité, en l’invitant dans ce qui pourrait ressembler à l’intimité de sa salle de répétition.
À découvrir par ici :
Comments