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Se laisser enivrer, emporter; Chavirer par Lola Lafon

Avec Chavirer, Lola Lafon livre un sublime roman féministe en traitant de l’effet du temps long sur les victimes de pédophilie.


Plus tard, Cléo, jeune collégienne en banlieue parisienne, veut être danseuse. Cathy, une femme séduisante lui

tend la main en proposant une bourse d’une Fondation inconnue pour qu’elle accomplisse cette vocation. Mais cette main est un atroce piège sexuel orchestré par d'abominables pédophiles qui ciblent les enfants pleins de rêves.

Cléo est dévastée. Cléo ne dit rien. Cléo entraîne d’autres collégiennes et ouvre une déchirure qui ne se refermera jamais. Déchirure morcelée sur une vie et renfoncée trente-cinq ans plus tard par un fichier de photos retrouvé sur internet.


Au-delà de son témoignage féministe, ce roman file un portrait social du milieu artistique des MJC de quartiers aux plateaux de Drucker où se succèdent des danseurs qui ne sont que les objets d’un public affamé. L’enfance de Cléo s’ancre à Fontenay-sous Bois, bien qu’à 3 km de Paris, mais très loin de la ville des paillettes.

Dans un entretien à France Culture à propos de son roman, l'écrivaine déclare : “la prédation et la Fondation de mon roman ont un système parfaitement libéral. Dans le monde du travail, il y a quantité de situation, où on ne vous dit pas quoi faire, ni à quelle heure partir, mais c’est suggéré, ou vous savez vous-même que vous devez rester jusqu’à 21 heures, vous l’avez intégré et vous n’avez même pas besoin qu’on vous le dise : ça c’est terrible. On a complètement intégré la notion d’être un objet de prédation, et on peut croire qu’on désire être une proie : ce qui est enseigné aux petites et aux jeunes filles, c’est comment être le plus consommable possible. “


Le rythme du roman est rapide, saccadé ; les chapitres sont très courts. Impossible de ne pas tourner les pages, de ne pas chavirer et se laisser emporter ou enivrer par les phrases de Lola Lafon.



Chavirer, Actes Sud, 20,50€

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